NOS ANCETRES - LES ARABES I

 

 

LA CIVILISATION ARABO MUSULMANE

                                                                                                                            Ses gloires et son apport

 

La civilisation de l'Islam a apporté une contribution indélébile au corpus des connaissances de l'humanité.

Son apport le plus important était de faire le lien entre la culture orientale et la culture occidentale au moyen âge

et d'avoir transmis à l'Europe un patrimoine inestimable de l'humanité. Les ouvrages d'Avicenne,Averroès,

Al Khawarismi,Attusi,Jaber Ibn Hayane,Al Idrissi et de plusieurs autres savants musulmans ont été,pendant

plusieurs siècles,des repères incontournables dans les universités européennes.Les empreintes de la langue arabe

qu'on rencontre dans les langues latines témoignent de ce passage de relais.
 La contribution  de cette civilisation ne se réduit pas aux apports de quelques savants prestigieux et représente dans

l’histoire de la science non pas un épiphénomène,mais bien un chaînon spécifique dans un long processus évolutif.

Héritière de presque toutes les traditions scientifiques qui l’ont précédée (et pas uniquement celle de la Grèce),

passage obligé vers les, sciences ultérieures, elle constitue une des phases importantes de l’Homme dans sa quête de la

vérité,quête qui a démarré lentement dans la nuit des temps et qui s’est poursuivie à travers les traditions prestigieuses

de la Chine,de l’Inde,de la Mésopotamie,de l’Egypte,de la Grèce et hébraïque (pour ne parler que de celles qui ont un

lien attesté avec la tradition scientifique arabe).
Du VIIIe au XIIIe siècle après J.C.,la civilisation de l’Islam (ou civilisation arabo-musulmane) domina le bassin méditerranéen.

Issues d’une Arabie en grande partie désertique ne possédant que quelques rares villes commerçantes

(La Mecque, Yathrib),des troupes arabes,formées au départ de tribus guerrières nomades conquirent en un siècle

(632-732) un immense empire.Dès le haut Moyen Age(VIIIe-IXe siècle)cet empire s’étendait de l’Indus à l’Atlantique,

englobant l’Iran oriental,la Perse,l’ancienne Mésopotamie (Irak, Syrie, Palestine),l’Egypte,la Libye,les pays du Maghreb

et l’Espagne.
La civilisation arabo-musulmane est une et plurielle.Ses créateurs furent et sont des Arabes et des arabisés musulmans.

Cette civilisation naît de contacts,d'emprunts,d'apports:elle gère et invente un héritage où l'Islam occupe une part intime

non seulement parce qu'il est universel mais aussi parce qu'il vient sacraliser certains traits de culture,en réformer

d'autres et souvent s'inscrire dans une continuité de civilisations antérieures.
Du VIIIe au XIIIe siècle,le monde musulman devint un pont,l’intermédiaire obligé entre l’Orient et l’Occident.

Pendant que les empires chrétiens,cantonnés sur la rive septentrionale de la Méditerranée (à Rome,Byzance, etc.),

affrontaient les invasions barbares et devenaient en proie à de profondes divisions internes,les pays islamisés drainaient

vers eux les fabuleuses richesses de l’Extrême-Orient :richesses matérielles comme la soie,les épices ou les métaux

précieux, technologiques comme par exemple la fabrication du papier ou l’imprimerie mais aussi richesse des savoirs.

Des taxes importantes accompagnaient les transactions commerciales et ceci permit l’apparition de métropoles régionales

riches et peuplées comme Bagdad,Samarcande,Ispahan,Damas,Marrakech,Cordoue,Séville ou Kairouan.

Ces capitales devinrent de grands centres culturels et se couvrirent de palais, de mosquées, de bibliothèques,d’universités

(« les maisons de la sagesse » ou « bayt el hikma »), d’observatoires astronomiques et d’hôpitaux qui furent autant de

monuments splendides.
Dans sa monumentale Histoire des Sciences (inachevée, en sept volumes),Georges Sarton consacre chaque chapitre à un

demi-siècle de l’histoire de l’humanité et lui donne pour titre le nom du savant le plus éminent marquant le plus cette

période (sur le plan mondial).Ainsi par exemple, de 500 à 450 avant J.C.,s’étend l’ère de Platon,puis viennent

successivement les ères d’Aristote,d’Euclide, d’Archimède et ainsi de suite.Du VIIIe au XIe siècle,tous les chapitres

portent le nom d’un scientifique de la civilisation islamique.C’est seulement en 1100 après J.C.que les premiers noms

occidentaux commencent àapparaître,partageant cependant les honneurs pendant encore 250 ans avec des scientifiques

de terre d’Islam.

Tableau I -Quelques grands savants (traduit, d’après G.Sarton, Introduction to
the history of sciences, 1975)

      Période historique

Scientifiques les plus éminents sur le plan mondial

      700-750

Bède le Vénérable (en Occident) et Jafar al Sadiq

      750-800

Jabir ibn Hayyan

      800-850

Al-Kwarizmi et Al-Kindi

      850-900

Al-Razi et Hunayn ibn Ishâq

      900-950

Al-Masudi

      950-1000

Ibn al-Haytham et Abu al-Wafa

      1000-1050

Al-Birûni et Ibn Sina

      1050-1100

Omar Khayyam

 

         Naissance et expansion de l’Islam

Il est impossible de comprendre la naissance et l’emprise mondiale des sciences arabes et donc de la médecine arabe,

sans connaître les circonstances qui ont amené cette nouvelle religion issue du désert et ces bédouins au style de vie

nomade à devenir pour un temps les détenteurs de la civilisation.Ce qui caractérise justement la médecine arabe,

c’est la profonde originalité de ses débuts. L’initiation à la science des Arabes ne s’est pas faite selon les mêmes lois

habituelles du développement et de l’évolution des sciences.Dans la péninsule arabe,protégé par la mer, le désert et

les montagnes, vivait un peuple de pasteurs et de commerçants passionné pour la liberté,la guerre(A ce temp là les

tribus arabes se chamaillaient violemment de façon incessante),l’éloquence et la poésie ;peuple intelligent mais tout

d’intuition.Confiant à la mémoire ses poésies,ses grands jours et ses généalogies,il ne connut que tardivement l’usage

del’écriture.Ses relations avec la Perse lui avaient procuré quelques vagues notions de médecine.Une révolution

soudaine détourna le cours de sa destinée et ouvrit de vastes champs à son activité. Muhammad réunit les tribus

bédouines en restaurant le monothéisme abrahamique derrière une unité inconnue de ce peuple jusque là.

Un siècle à peine s’était écoulé depuis la mort de Muhammad que l’Empire musulman s’étendait de l’Atlantique à l’Indus.
 
LE PROPHETE MUHAMMAD
« Si la grandeur du dessein, la petitesse des moyens et l'immensité des résultats sont les trois mesures du génie de l'homme,

qui osera comparer humainement un grand homme de l'histoire moderne à Muhammad »

                                                                                          LAMARTINE « Le Prophète Muhammad »
 
  À l'âge de quarante ans, Mohammed  reçut sa première révélation de Dieu par l'intermédiaire de l'ange Gabriel.

Les révélations se poursuivirent pendant vingt-trois ans,et ensemble elles formèrent ce que nous connaissons

comme le Coran.
Dès qu'il commença à réciter le Coran et à prêcher la vérité que Dieu lui avait révélée, il souffrit, avec son petit

groupe de disciples,de persécutions de la part des polythéistes.
Le prophète enrôle ses premiers compagnons,les membres de sa famille et des gens de modeste condition,qui vont

former le « noyau dur » de ses partisans. Certains d’entre eux,sous la pression,s’exilent en Ethiopie.
En 622,persécuté, Muhammad quitte la Mecque pour Médine avec quelques dizaines de fidèles.C’est l’Hégire

(l’émigration), qui marque le début du calendrier musulman.C’est là qu’il posera les fondements d’une cité conforme

à la nouvelle religion.Les conflits et les affrontements armés se succèdent avec ses adversaires pendant huit années.

Enfin en 630, Muhammad rentre à la Mecque,sans combattre où il amnistie ceux qui l’avaient rejeté.
La ville qui l'avait traité si cruellement,l'avait poussé avec ses fidèles compagnons de se protéger des étrangers,qui avait

ruiné sa vie et l'existence de ses dévoués disciples,était à ses pieds.Ses anciens persécuteurs acharnés et impitoyables,

ayant déshonoré l'humanité de par leurs actes cruels infligés a des hommes et des femmes innocents et même aux

mourants,étaient présent totalement a sa merci lorsque il a conquit la Mecque alors il s’adressa a eux en leur disant :

« PARTEZ VOUS ETES LIBRES ».
 
«Muhammad est réellement un personnage historique… Muhammad nous apparaît comme un homme doux, sensible, fidèle, exempt de haine. Ses affections étaient sincères, son caractère, en général, porte à la bienveillance»

                                                              Ernest RENAN (Ecrivain) – Etudes d’histoires religieuses
 
 L’Islam,que Muhammad vient de révéler,est un monothéisme épuré à l’extrême,sans clergé ni rituels compliqués.

A un Dieu unique et tout puissant,le croyant s’adresse sans intermédiaires et rend individuellement compte de ses actes.

L’Islam s’adresse ainsi à la conscience personnelle de chacun,pour en appeler par delà les frontières familiales et

tribales à l’unité du genre humain.Il va très vite gagner les esprits, galvaniser les enthousiasmes.
Ainsi, à sa mort à Médine, le 8 juin 632, Muhammad laissait un peuple et un pays unifié, pacifié, organisé et animé d’une

fois intense en un seul Dieu.
 
Après avoir analysé les personnages les plus influents de l’histoire, M. HART plaça au premier rang Mohammad :

“La raison en est qu’il est le seul homme a avoir mené à bien son oeuvre avec succès tant sur le plan religieux que celui de la politique.”

                                      M. HART (astronome, mathématicien et historien) – Les 100 personnes les plus influentes de l’histoire (1981)
 
«S'il faut juger de la valeur des hommes par la grandeur des œuvres qu'ils ont fondées, nous pouvons dire que Muhammad fut un des plus grands hommes qu'ait connus l'histoire.Des préjugés religieux ont empêché bien des historiens de reconnaître l'importance de son œuvre.»

                                                                        Gustave Le Bon (1884) La civilisation des Arabes.

Conquêtes et expension de l'Islam

En 636, quatre ans après la mort du Prophète, les armées de l’Islam remportent une victoire décisive sur les troupes de

Byzance, et, dès l’année suivante,en 637,infligent aux Perses sassanides,une défaite dont ils ne se relèveront pas. En 642,

l’Empire perse s’écroule ouvrant la voie vers l’Inde.De son côté, Byzance perd la Syrie,la Palestine,l’Egypte, ouvrant la voie

à l’Afrique du Nord. En 649, Chypre est occupée, puis Rhodes.
 
Cet Islam,l’éminent orientaliste Jacques Berque, le salue comme

« un système, qui, à une époque de lassitude du monde, voulut lui rendre sa jeunesse ».
Le mot « conquête » en arabe se dit d’ailleurs fath (pluriel : futuhat), c’est-à dire « ouverture » dans le sens d’ouverture de

l’espace, d’ouverture à la lumière (de la nouvelle religion),de libération.On peut penser aussi que, au cours de la
phase suivante, quand la majorité des armées musulmanes s’est trouvée composée de gens des pays conquis.
 
Gandhi disait :
« Plus j'étudie plus j'apprends que la force de l'Islam ne se puise pas dans l'épée ».
 
Au départ, les troupes de cette conquête ont été formées de quelques milliers de cavaliers arabes,dirigés par des chefs de guerre

qui,Khalid Ibn al-Walid, avaient fait leurs preuves du vivant du Prophète.Puis, progressivement,au fur et à mesure qu’elles

progressaient,ces troupes ont été renforcées par des contingents provenant des pays conquis.La facilité de ce recrutement

et la rapidité relative de l’avance des armées musulmanes(du moins jusqu’au Maghreb), s’expliquent en grande partie par

l’accueil favorable des populations ou,tout du moins de la neutralité bienveillante.
 
Pourquoi cet accueil ? Dans le croissant fertile et dans les zones avoisinantes,existaient de fortes communautés chrétiennes,de

sensibilités et d’écoles variées,mais toutes opposées à l’orthodoxie byzantine et combattant son monopoleidéologique.

C’est le même phénomène que l’on observait en Egypte.Dans ce contexte, l’Islam arrive avec un discours d’ouverture.

La nouvelle religion tolère toutes celles qui s’apparentent à elle,c’est-à-dire les religions monothéistes,avec leurs différentes

sensibilités.Elle demande seulement qu’on l’accepte elle-même ;
elle n’impose rien dans le domaine cultuel pour les non-musulmans.De fait, dès 650 après J.-C., un évêque nestorien écrivait

déjà les lignes suivantes :
« Nec tamen religionem Christi impugnant sed potius fidem commandant sacerdotes sanctosque domini honorant. »

(« Non seulement ils ne combattent pas la religion du Christ mais encore ils protègent notre foi et honorent les

prêtres et les saints du Seigneur. »)

                      LECLERC, L. « Brochure sur l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie »,

                                                                      cité par AMMAR, S. « Médecins et Médecine de l’Islam »
 
La Perse,où la crise était profonde,s’est effondrée rapidement.L’Empire byzantin a mieux tenu,même s’il a perdu la plupart

de ses possessions.Un grand nombre de personnes s’étant islamisées dans l’intervalle,les armées ont rapidement gonflé et leur

composition a commencé à différer notablement de celle du début.La fulgurance de la conquête confortait évidemment l’idée

que Dieu soutenait cette avancée,et ne pouvait que favoriser le phénomène d’expansion.
 
« Aucune autre religion dans l'histoire ne s'est propagée aussi rapidement que l'Islam....

L’occident a largement cru que ce déferlement religieux fut rendu possible par l'épée.

Mais aucun érudit moderne n'ccepte cette idée et le Coran est explicite dans le soutien de la liberté de conscience»           

                                 Islam-The Misunderstood Religion, Readers Digest (Edition Americaine) Mai 1955.
 
La force nouvelle que l’Islam insuffle aux Arabes, tient au contenu comme à la forme du message prophétique.

Par le lien original qu’il établit entre la toute puissance divine et la marge d’initiative humaine,l’Islam incite le croyant à
l’action. Il lui offre une destinée possible sur la Terre.Par ailleurs, le message prophétique est formulé dans une langue qui

s’impose à tous par la puissance de son souffle, le jaillissement continu de son inspiration,la densité souveraine, envoûtante

de son pouvoir d’expression.
Contrairement à des idées reçues,l’attitude des troupes arabes qui ont participé à la conquête n’a pas été de tout saccager sur

leur passage (comme les Mongols l’ont fait ultérieurement).Des historiens des milieux intellectuels européens du XIXe siècle,

avaient en effet affirmé que les Arabes au cours de leurs avancées avaient tout détruit.Puis, quand ils se sont civilisés au contact

de peuples plus évolués qu’eux,ils ont fait acte de contrition et ont tenté de récupérer et de protéger ce que leur fureur de

conquérants n’avait pas éliminé.Il y a des citations fameuses allant dans ce sens et attribuant à tort la destruction de la célèbre

bibliothèque d’Alexandrie aux Arabes.C’est historiquement une
contrevérité, dont le seul intérêt est de nous renseigner non pas sur les Arabes mais sur l’état d’esprit de ceux qui en parlaient.

Il suffit de lire à ce sujet les premiers grands historiens français des sciences,comme Montucla (1799) ou Chasles(m.1880).
Il ne semble donc pas qu’il y ait eu de stratégie de destruction. Il semble même qu’il y avait, de la part des musulmans, un

certain respect à l’égard de ces pays de vieille civilisation dont ils faisaient la conquête. Leur force était la nouvelle religion

dont ils étaient les porteurs, non la science qu’ils ne possédaient pas encore.
 
A. S. Tritton illustre Historien disait : «l'image du soldat musulman avançant avec une épée dans une main et le Coran dans lautre est tout à fait fausse» L'Islam. Londres 1951 page 21

De Lacy Oleary, Historien disait :
« L'histoire est claire sur ce point: la légende des musulmans fanatiques s'abattant sur le monde, imposant l'Islam,à la pointe de l'épée, aux peuples vaincus est un des plus fantastiques et absurdes mythes que les historiens ont pu répéter. »

                              Aux carrefours de l'Islam, page 28- (Ed. originale Islam at crossroads, Londres 1923, p.8)


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