MAYSSRA

Maysra est située en amont d'un khneg (gorge) tapissé de lauriers roses et de sable fin, toute cette région est parsemée de remth, une magnifique plante qui résiste aux aléas climatiques les plus rudes, elle est très prisée des dromadaires, les nomades l'utilisent pour soigner les rhumatismes et maux d'éstomac
Mayssra se résume à une vieille zaouia en ruines et qui pourrait dater du douzième siècle, elle est située dans un somptueux cadre et au milieu d'une petite gara (monticule), elle est entourée de deux grands cimetières dont les tombes sont presque effacées
Ces grands espaces encore préservés sont habités par de rares nomades des tribus des rzeïgat, des ouled sidi Amar et des ahl Makna disséminés dans ces immenses solitudes
En cours de route je rencontrais un meddah (rhapsode arabe) originaire de Boualem , il sillonnait  la région à pied ou des fois en auto stop en quête de zaqat auprès des rares riches nomades de la région, sinon pendant les waadate ou taam (fêtes annuelles réservées aux saints) 

Ahmed (son prénom) était d'une compagnie très agréable, il était emmitouflé dans une vieille djellaba qui achevait de se déteindre, la tête recouverte d'un chèche blanc, en cours de route il ne cessait de me réciter les poèmes de feu Mohamed Belkheir , sinon des légendes où défilent les saints de la région et leurs miracles, il avait le visage burriné par le soleil à force de marches sous un soleil  ardent, son bagage se résumait en un vieux sac en nilon garni de rouina et de petit lait et d'un bâton

Nous décidâmes de rallier le lieu dit Mayssra au milieu de ce vide immense, il me semblait presque toucher les montagnes environnantes , tout n'est que volupté et silence , on croirait même entendre les fourmis converser; le terrain s'ondule devant nous traversé quelques fois par des oueds , ça et là des ghdir (marre d'eau) témoins d'une crue lointaine, nous acccedames à Mayssra par un petit mhej (sentier) , de cette vieille zaouia 3  en ruines , je ressentis une impression subtile de recul vers les siècles abolis de foi et d'immobilité , cette zaouia en ruine comporte une petite mosquée et deux petites pièces réservées pour les ziar (visiteurs) , à l'nterieur d'une de ces piècees sont visibless quelques ustensiles de cuisine pour que tout visiteur puisse préparer du thé, quelques fois on dépose même de la faine et des dates sèches , l'autre pièce est réservée aux femmes, sont visibles des foulards et divers pans de tissus pour demander la baraka du saint de cette zaouia , un silence lourd et apaisant plane sur cette vieille zaouia croulante , me voilà affranchi l'espace de ces quelques moments du joug pesant du temps et de l'espace et d'un mode de vie qu'on veut nous imposer de force
Triste de dire que ces ruines ne sont pas dues à l'usure du temps  mais à la main criminelle de l'homme qui détruit tout sur son passage

Ô volupté des logis de hasard où, insouciant, seul, ignoré, oublié de tous, on s’endort !…
               Ombre amie des ports provisoires, des haltes lentes sur la route ensoleillée du vagabond libre !
                              Douceur infinie des rêves quintessenciés, dans les abîmes de silence et d’immobilité, aux pays d’Islam !
(I. Eberhardt)

En quittant les lieux non sans tristesse , je priais pour que cette vieille zaouia et ce  magnifique petit éden saharien conserveraient à jamais leur beauté "primitive". Par la suite et soixante kms plus au sud nous mettons le cap vers El M'ssaiëd et la zaouia des sidd Naceur et de sidi Amar elles aussi tombées en ruines et dans l'oubli le plus absolu
Au coucher je déposais Ahmed non loin d'un campement nomade où il comptait se rendre, il sera hébergé et nourri pendant deux ou tris jours en echange de quelques couplets du poete Mohamed Belkheir

NB/ Zaouia veut dire refuge où l'on enseigne le coran , refuge aussi pour les pauvres et nécéssiteux
        Zaqat :La Zaqat est l'aumône obligatoire versée annuellement en vertu des règles de solidarité de l'Islam. Tous les ans, tout musulman
        dont la richesse dépasse le Nissâb (seuil minimum de la richesse), doit s'acquitter de 2,5 % du montant total de ses avoirs sur une année lunaire ou bien
        2,579 % si l'on se base sur l'année solaire.
        Rouina : farine de blé grillé qu'om détrempe dans l'eau pour s'en nourrir

Par Noureddine Toumi
                Le mardi 29 fevrier 2024

Photos prises le 22 fevrier 2024
Le présent album comprend 152 photos au format Ultra Grand Angle
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ALBUM PHOTO - ZAOUIA DE MAYSSRA