RÊVES BRISÉS

 

 

 

RÊVES BRISÉ

LA GARA D'EMBARKA BENT EL KHASS

 

J'appréhendais depuis plusieurs années l'instant fatidique où ces lieux seront squattés par la vermine , une vermine imbue par une richesse mal acquise j'avais mis une croix pour ne plus y retourner tellement ces lieux se dégradent à une vitesse vertigineuse , j'ai été horrifié par la vue de toute sortes de détritus sur ce sanctuaire autrefois si paisible, en parcourant jadis ces lieux tant aimés , j'éprouvais une joie intense , j'étouffais presque et n'avais qu'une idée en tête ; déguerpir au plus vite
Pour completer ce tableau sinistre on a construit d'hideuses toilettes en parpaings au beau milieu de ce site et me vient en mémoire ces paroles d'un chef indien qui disait à l'intention de l'homme blanc qui a volé sa terre:
Contaminez votre lit, et vous suffoquerez une nuit dans vos propres détritus, mais en mourant vous brillerez avec éclat, ardents de la force du dieu qui vous a amenés jusqu’à cette terre et qui pour quelque dessein particulier vous a fait dominer cette terre

Juste en face de cette d'immenses surfaces de terre ont été attribuées à des "investisseurs", toutes les plantes propres à cette régions ont été rasées , ces plantes étaient un veritable frein contre l'avancée des sables, les tempêtes de sable après ce carnage sont quasi quotidiennes

En ce début de printemps tout n'est que désolation , aucun son d'oiseau , traquets du désert et alouettes qui peuplaient ce coin ont disparu
il m’a semblé que je regardais un paysage quelconque, le lien profond qui m’attachait à cette gara m’a semblé rompu à tout jamais. je me sentais étranger à ces lieux
Qui me rendra mon « bled » éternellement ensoleillé, et nos blanches koubas, et les horizons infinis de sables,  
L'âme de la belle Embarka a déserté les lieux , à vrai dire tout nous quitte
Que dire, que chanter sur les couchers de soleil au désert ?
Où prendre des mots suffisants pour en fixer la splendeur, pour en exprimer le charme, la mélancolie et le mystère ? 
Comprennent-ils tout cela ?
Quelques ruines de ce qui fut l'ancien ksar d'Embarka bent El-Khass  sont encore visibles au dessus de cette citadelle

L'avènement d'internet y est pour beaucoup dans la destruction de nos sites et moi je dis vivement l'âge de pierre 

NB . Le thermomètre en ce 23 mars et début de printemps indiquait 40 degrés, l'été risque d'être une fournaise

 

    LA LEGENDE DE BENT EL KHASS

 

 

  Lorsqu'on entre dans le Sahara par l'oasis de Brezina, au seuil de l'oued Segueur, on voit surgir du sol, à perte de vue plat et nu,
  
comme une silhouette  étrange de château démantelé. De près, la forteresse est un plateau tabulaire, rigoureusement carré,
  
taillé dans la forme d'un dé à jouer, en pans   abruptes. Il a plusieurs kilomètres de tour. D'autres rochers volcaniques, de même
  
coupe mais de taille inférieure l'entourent comme des ouvrages
  
avancés. Ces falaises sans grèves ont donné leur nom à la partie du Sahara qu'elles dominent. On l'appelle la Région des Gour.
  
Chaque jour compte plusieurs gara qui ont leur nom et leur histoire. Voici la légende du gara de Brezina
  
Au nom d'Allah, très juste et très bon. Un jour, Dieu voulut créer une femme qui eût une âme. Et il forma de ses mains Bent-el
  
khass .  Ses yeux étaient  noirs et bien fendus.
  
Ses sourcils ressemblaient au trait arrondi du noun que trace la main d'un écrivain habile. Son front semé d'étoiles bleues était
  
large   comme la lune dans   la nuit de sa rondeur. L'ouverture de sa bouche faisait songer à une bague, la fraîcheur de ses lèvres à
  
un sabre ensanglanté. Ses dents brillaient comme   des coquillages, ses joues comme des roses. Ses épaules s'arrondissaient
  
comme un arceau d'ivoire. Sa gorge potelée était de celles dont les textes ont dit :
« Ta gorge réchauffera ton mari et rassasiera tes enfants. » Et comme Bent-el-Khass devait commander à des hommes, Allah lui donna par surcroît les dons virils. Derrière les paroles,
sa pensée devinait le secret des coeurs. Derrière les obstacles, ses yeux voyaient à trois jours de marche. Un jour, sa chamelle favorite se sauva loin du gara, brûlée par l'amour d'automne.
Les vieux cavaliers estimaient son prix à quatre cents boudjou. On aurait donné dix chameaux de bât pour elle

Personne n'osait annoncer à Bent-el khass le départ de la chamelle bienaimée. Mais elle-même, étant montée sur sa terrasse, après le.bain, à l'Heure du moghreb, mit la main sur ses yeux à cause du soleil couchant.. Et elle prononça : ,. — Je vois ma chamelle qui a suivi l'amant de son coeur. . En même temps, elle . cria à haute voix : — Zem ! Zem ! C'est-à-dire : « Reste-là ! » Des cavaliers coururent dans là direction que Bent-el-khass avait, indiquée, et le troisième jour, ils découvrirent la chamelle sous un bétoum. Agenouillée sur la terre, elle ruminait du drine.. Le Sultan Noir entendit; parler de Bent-el-Khass. Il leva ses tentes et dit à ses cavaliers : —Allons trouver la femme qui. a une âme, je veux avoir un fils d'elle. Il envoya devant lui des chanteurs qui, au pied du gara, vinrent déclamer des vers en l'honneur de leur maître : « Que de fois, IL a étendu sur la poussière le mari d'une femme très belle, dont la vie coulait par une blessure semblable à une lèvre fendue. Bent-el-Khass, interroge les cavaliers si tu ignores ses exploits. Ils te diront qu'il est toujours monté sur un cheval rapide et couvert de cicatrices. « Son fer perce les burnous : le héros n'a point d'abri contre sa lance. « Il le laisse en pâture aux bêtes sauvages qui rongent ses belles mains, ses beaux bras. « Lorsqu'il met pied à terre pour achever un ennemi, les lèvres du mourant se relèvent sur les gencives. Mais ce n'est pas pour sourire. « Sa lance s'allonge comme les cordes d'un puits pour s'enfoncer dans le poitrail des chevaux; sa jeunesse brille comme un bracelet sous les plis d'un haïk. » Bent-el-Khass écouta les chanteurs déclamer. Quand ils eurent déposé leurs instruments, elle répondit par les vers du poète :

« J'ai pour demeure Adya, une citadelle avec de l'eau, où je puise quand je veux. Ma forteresse est élevée ; les aigles eux-mêmes n'y peuvent atteindre. Si une injustice me vise, je n'en souffre pas. » Alors le Sultan Noir envoya deux vizirs au pied du rocher pour annoncer ses présents. — Bent-el-Khass ! notre maître a apporté pour toi mille douros dans un coffre. Il te le fera remettre par dix négresses d'une beauté parfaite, nées le même jour. Tu trouveras parmi ces présents innombrables des bracelets de bras et de pieds en argent; deux pièces d'étoffe du Soudan de dix coudées, quatre haïks fins, des tapis et des pantoufles de Fàs, quarante guessâa de blé, vingt guessâa d'orge, six pots de beurre, des clous de girofle, du serghîna, du koheul et des parfums pour la toilette des femmes, enfermés dans une haïba en peau de laroui, avec sa serrure. Bent-el-Khass répondit aux vizirs :

— Dites ceci à votre maître : la quenouille de mes femmes suffit à me vêtir; l'antimoine est aussi sombre dans ce pays-ci que dans le sien. Les vizirs revinrent au camp, vers l'Achâ, c'est-à-dire deux heures après le coucher du soleil. Le Sultan Noir avait donné l'ordre de préparer du couscoussou à la poule, au mouton et à la citrouille, des viandes rôties, des dattes et du lait frais pour mille bouches. Deux nègres tenaient par la bride, l'un à droite, l'autre à gauche, un mulet caparaçonné d'un tapis à franges qui devait ramener la fiancée. Quand il connut la réponse de Bentbel-Khass, le Sultan entra dans une grande colère. Il ordonna : — Jetez dans la fontaine toutes les toisons des moutons que vous avez égorgés; aveuglez la source avec du sable. Demain, l'eau manquera à la Reine des Gour, et peut-être le soleil attendrira son coeur. Les nègres firent comme leur maître avait dit, et le lendemain, à l'aurore, quand les femmes de Bent-el-Khass vinrent pour chercher de l'eau au puits, elles virent que la source ne sanglotait plus dans le sable.

Elles coururent conter à leur maîtresse la mauvaise nouvelle. — Sûrement, c'est le Sultan Noir qui a tari la source. En parlant, elles pleuraient. Bent-el-Khass dit : Celui que je hais ne me tient pas encore. Et elle reprit son visage riant. Une semaine s'écoula ainsi où chacun mesura sa soif. Un matin, les suivantes déclarèrent : — Il n'y a plus d'eau que pour un jour. Alors, sans s'émouvoir, Bent-el-Khass commanda : — Faites un tas de tous les haïks, de tous les burnous, de toutes les gandoura. Lavez-les avec cette eau qui vous reste. Étendez-les sur des cordes au grand soleil. Les femmes crurent que la douleur avait troublé la raison de Bent-el-Khass. Elles murmurèrent : — Maîtresse, voulez-vous nous répéter l'ordre que vous nous avez donné? Bent-el-Khass lisait dans leurs coeurs. Elle répéta : — Faites comme j'ai dit. Je vois plus loin que vous. Les médecins du Sultan Noir lui avaient promis la capitulation de  el-Khass pour le jour même. Il était monté à cheval avec l'aurore pour se porter au-devant de la reine. Au soleil levant, il aperçut toutes ces étoffes blanches que le vent gonflait comme des voiles. Il fit appeler ses médecins et demanda : — Que vois-je donc là-haut? Les médecins répondirent : — Ce sont sans doute des nuées blanches qui se reposent sur le sommet du Gara avant que de reprendre leur course. Mais le Sultan Noir s'emporta dans une colère si terrible que tous ses cavaliers sentirent trembler leurs coeurs. — Vous mentez ! Ce ne sont pas là des nuages : ce sont les haïks de Bent-el Khass. Elle les blanchit pour nous narguer. La reine boit là-haut à quelque source inconnue. Jamais nous ne la prendrons par la soif. Le Sultan fit couper la tête à ceux qui l'avaient trompé, puis il leva le siège pendant la nuit avec toute son armée. Et Bent-el-Khass vécut cent années arabes. Sur sa terrasse ou sous sa tente, elle aima des guerriers, blancs comme elle. Elle eut d'eux des fils en grand nombre qui tous furent valeureux. Quand elle mourut, le kohl de ses yeux descendit sur ses dents, le souak qui rougissait ses gencives monta à ses yeux. Et par la volonté d'Allah, très juste, très bon, elle garda dans la mort une splendeur de beauté, terrible, telle que les hommes n'en ont plus jamais vue. ...

 

                                                                                                         Le vendredi 25 Mars 2023
                                                                              Le present album comprend 100 photos au format Ultra Grand Angle

                                                                                            Photos prises le 18 et 23 Mars 2023
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LA GARA DE BENT EL - KHASS VUE AVEC MON APPAREIL PHOTO

 

 

 

 

 

 

 
 
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Commentaires (4)

René -  Sur : RÊVES BRISÉS
  • 1. René - Sur : RÊVES BRISÉS | samedi, 01 avril 2023
Sublimes images de paysages envoûtants au coucher du soleil.
Dommage que des visiteurs ne respectent pas cette nature exceptionnelle! Merci encore. Chaleureusement.

Raymond
  • 2. Raymond | mardi, 28 mars 2023
Quelle belle légende ! et qui nous fait rêver encore maintenant et quelles belles images pour l'illustrer. Si Noureddine est un artiste !!!
Noureddine -  Sur : RÊVES BRISÉS
  • 3. Noureddine - Sur : RÊVES BRISÉS | mardi, 28 mars 2023
Ces barbelés c'est pour éviter aux pauvres dromadaires de ne pas accéder à ces terres dédiées à l'agriculture
Drôle d'époque
Mais ces paysages reprendront leurs droits (une petite question de temps)
Le désert ne peut être apprivoiser
Amitiés
Danièle Ponsot -  Sur : RÊVES BRISÉS
  • 4. Danièle Ponsot - Sur : RÊVES BRISÉS | mardi, 28 mars 2023
Pourquoi ces barbelés? Et le cube de béton des toilettes, parmi les splendeurs minérales du paysage!!! Je comprends votre colère, Noureddine! Merci pour ces images, toujours émouvantes.

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