AÏN LAAMARA

 

 

AÏN LAAMARA

 

SUR LES TRACES D'EMBARKA BENT EL- KHASS

 

                     Ne dit-on pas que le hasard fait bien les choses et c'est ce qui m'est arrivé , en voulant rallier Aïn Laamara (ksar Bent El-khass)
                     j'ai pris une autre piste , ce n'est qu'au bout de deux kilomètres que je me suis aperçu que je je me suis dévié de mon chemin ,
                     tant pis cette piste m'emballait car elle semblait vide de toute trace , l'environnement était des plus sains , aucun sachet plastic ni
                     autres détritus le long et aux abords de cette piste qui laissait penser à une quelconque présence humaine , je roulais une bonne
                     demi-heure, elle semblait interminable et sans fin cette "route" et pas âme qui vive et c'est ce qui a toujours fait mon bonheur  
                     Un long oued longeait cette piste déserte et était garni de magnifiques bosquets de lauriers roses et de somptueux btoums (térébinthes),
                     de quelques palmiers et de rares jujubiers sauvages, je restais un long moment devant un magnifique et tres vieux btoum tel une sentinelle
                     sur les berges de l'oued

                      Malheureusement les lieux  courent de grands risques, à vrai dire c'est depuis la distribution d'immenses surfaces de terres que j'ai compris
                      que la région allait connaitre beaucoup de bouleversements à l'image des gours de bent el khass qui connaissent une su fréquentation menaçant
                      leur pérennité et leur équilibre écologique , victimes de leur popularité , ils perdent même leur âme, ce maudit tourisme ne fait qu' engendrer
                      également la folklorisation de notre culture tout comme une urbanisation galopante (nouvelle ville de Brezina)
                      Sachets, bouteilles plastics  et jusqu'aux couches pampers envahissent ces lieux jadis si vierges 
                      Même des marches à pied l'affluence touristique peut deteriorer le patrimoine de cet environnement si fragile comme c'est le cas des gours et du ksar
                      de bent el khass où le passage de ces "visiteurs" crée une érosion qui menace même à long terme ces lieux et qui dit beaucoup de monde dit beaucoup
                      de déchets
                      La bête immonde gagne beaucoup de terrain et étend partout ses tentacules hélas
                      Qui me rendra ces sites tant aimés où autrefois je gambadais en solitaire perdant toute notion de temps, ce temps si cher à notre civilisation
                      des temps "modernes"

                                                                                                                                          Le dimanche 20 juin 2021
                                                                                                                                                Pensées sincères à l'amie Badr

 

 

 

EMBARKA BENT EL-KHASS

 

                                                                                                                 


    

PAROLES DE SAGESSE              

 


 

Les traditions des Arabes du Sahara algérien, issus de la grande famille des Béni H-Hâl; ont conservé lé souvenir d'une femme appelée tantôt Bent el Khass, tantôt Embarka bent el Khass. Elle personnifie le bon sens naturel et la sagesse populaire, aussi lui a-t-on attribué un certain nombre de maximes applicables à la vie quotidienne: de là, sa réputation d'habileté a fait d'elle l'héroïne d'un stratagème ingénieux,grâce auquel un ennemi dupé se retire au moment ou ses adversaires sont près de succomber; enfin, elle a été représentée comme ayant construit des ouvrages dont il ne reste que des ruines. Son père, toujours suivant la légende, était cultivateur et très généreux. Elle avait pour cousine la fille d'un nomade, propriétaire de chameaux. Cette dernière dit un jour à Bent el Khass : Celui qui est riche possède des chameaux et non des cultures. La jeune fille rapporta ces paroles à son père qui lui dit : Réponds-lui «Le fumier rend fou ; S'il vient, il t'emporte et emporte les chameaux. »

 (e'est-à-dire qu'une culture qui réussit permet de tout acheter). En efîet, une bonne récolte survint et le père ds Bent el Khass acheta tous les chameaux de son frère. Une autre fois, Bent el Khass se disputa encore avec sa cousine. Celle ci lui dit : Mon père est un brave, chaque jour il tue dix hommes; qu'a tué ton père?— Bent el Khass lui redit ces propos. Un jour qu'il était chez lui, cinquante cavaliers vinrent lui demander l'hospitalité. Il les fit entrer, les hébergea, les débarrassa de leurs fusils(sic) qu'il remit à sa fille en luf disant : Va les montrer à ta cousine et dis-lui : Ton père a-t-il jamais rapporté un pareil trophée ?-- A cette question, la cousine demeura muette et fut obligée de reconnaître la supériorité de son oncle; . Dans les récits qui précèdent, la sagesse appartient au père de Bent pi Khass \ dans;ceux qui suivent, c'est celle-ci qui se distingue par son esprit de répartie; Son père lui demanda un jour : Les nuits sont- elles plus nombreuses que les jours ? — Les jours sont plus nombreux que les nuits. — Et pourquoi? — Parce que les nuits de lune sont semblables à des jours. Une autre fois, elle dit à son père : il y a trois choses qui jaunissent la face et trois choses qui la rougissent (1). Quelles sont celles qui jaunissent la face ? — Marcher pieds nus, avoir le dos chargé et une femme dépensière. Et quelles sont celles qui rougissent la face ? Connaître le lignage, connaître les filles illustres et se contenter de ce qu'on possède (?). Un jour qu'elle était avec son père, elle lui dit : « La générosité se fait avec ce qu'on, trouve . Il répondit : La générosité est supérieure  y Des cavaliers vinrent lui demanderl'hospitalité;
Sur des proverbes analogues où les choses vont trois par trois, cf. Mohammed ben Cheneb, Proverbes arabes de l'Algérie et du Maghreb

Comme il était pauvre, il se cacha. Sa fille lui dit : Va trouver tes hôtes et ne crains rien. 11 sortit au devant d'eux, les introduisit chez lui et les fit asseoir. Pendant ce temps, Bent el Khass allait tirer des bâts des chameaux les épis de blé avec lesquels ils étaient rembourrés. Elle s'en servit pour préparer du couscous pour ses invités. Qnând ils eurent fini de manger, elle dit à son père : La générosité n'est pas supérieure  11 comprit l'allusion ef répondit: La générosité se fait avec ce que l'on trouve. En se promenant avec son père, elle lui dit en passant près d'un champ de blé : Une belle culture ! Que son propriétaire ne la défend-i1 Son père lui demanda : Pourquoi cette culture est-elle prête ? — Que ne la défènd-il de la dette (1) ? On cite encore d'elle ce dicton sur l'agriculture : Tous les fruits précoces sont bons. Sauf le blé et l'orge — je ne sais (2). Vint le moment de la marier. Un jour de printemps, elle alla se promener avec son père dans les cultures.L'orge verte avait une coudée de long; il avait plu pendant la nuit. Elle dit à son père : la terre a passé la nuit avec son étalon - il comprit que sa fille, jusque là hostile au mariage, s'était décidée à accepter un mari. La tradition ne nous a rien conservé sur ce mari, pas même son nom ; mais elle nous apprend que Bent el Khass eut un fils à qui elle ne ménagea pas les sages maximes qui l'ont rendue célèbre. Quand il se préparait à monter à cheval pour aller à la chasse ou en expédition, elle lui disait : Mon fils, déjeûne le matin. Si on ne t'invite pas (en route), tu ne défailliras pas, et si on te repousse, on ne t'atteindra pas

Un jour, il lui demanda de l'argent pour acheter des chevaux. Elle lui dit : — Quelle sorte de chevaux achèteras-tu ? — J'achèterai un cheval répandu, dont la croupe soit rembourrée sous les tapis de la selle, dont l'oeil ne voie pas et l'oreille n'entende pas, qu'une musette nourrit et qu'un sac couvre. Elle lui répondit : 11 est impossible qu'on en introduise un pareil au marché: les juments des pauvres n'en portent pas et le riche n'en vend pas . Elle fit la même réponse à son fils qui lui demandait de l'argent pour acheter des boeufs. Lesquels veux-tu acheter ? lui demanda-t-elle. — Rouge-prune,ou noir foncé, ou gris avec lés lèvres blanches. Elle lui répondit : « On n'en amène pas de tels au marché : la vache des pauvres n'en produit pas de pareils et le riche ne les vend pas »

Dans les Gnomes de SidiAbd er Rahman el Medjedoub  (Paris. 1886, in-12, p. 88) M. de Castries cite un dicton de Bent el Khass sur les chevaux, mais il est différent : 0 vendeur de blé, qu'achèteras-tu? — J'achèterai des chevaux. — Achètes-en, mais en petit nombre ; sur leur dos,-on va vite, mais leurs ventres sont ruineux.

Ce-fils, dont le nom est inconnu, mérita les éloges de sa mère qui disait de lui : Mon fils est toujours sur pied, Il ne soupe pas la nuit où il a des hôtes, Il ne dort pas la nuit où il craint  On cite encore les maximes suivantes de Bent el Khass : Un sultani (pièce d'or) dans là main vaut mieux que dix dépensés . — Lève-toi le mâtin, tu accompliras ce que tu as affaire et écoute ce que dit le présage . Donne ta fille (en mariage) avant le jeûne (avant qu'elle ait atteint l'âge du jeûne) ; on ne tiendra pas de propos sur elle

M. de Castries cite un dicton sur les chameaux « 0 vendeur de blé, qu'achèteras-tu? — J'achèterai des chameaux. — Elle reprit : Achètes-en beaucoup; leur dos est fort et leur lait est un trésor. Ils t'emporterontd u pays de l'abaissementet te déposeront dans le pays de la considération. »

Sur Tlemcen ; ..'«.' Salue les gens de Tlemcen et dis-leur : Leur printemps est leur hiver. Ils soignent leur graisse et leurs conserves de viande, Lorsque l'époque des labours arrivait, elle disait à ses khammès : « Les labours ne doivent durer que quarante jours ; hâtez-vous pour ne pas labourer pendant trois mois. — Pourquoi? — L'hiver dure deux mois et le troisième mois fait partie du printemps »Aux autres cultivateurs qui demandaient des renseignements, elle répondait : ((Vous avez du temps ; l'hiver, dure trois mois ». C'est en raison de cette réputation de sagesse qu'on lui attribua l'invention d'une ruse de guerre qu'on retrouve sous une forme différente dans les traditions d'un grand nombre de peuples. Une ville assiégée est à bout de ressources: il s'agit de décourager l'assiégeant et de lui faire croire qu'on a des vivres et de l'eau en abondance .

 

 

Tantôt, on chasse dansle camp ennemi un boeuf, un veau, une chèvre ou un porc nourri avec ce qui reste de grains ; tantôt, on expose aux yeux d'un espion ou d'un parlemetaire des monceaux de sable couverts d'une mince couche de blé ou des tables largement servies  ; ou encore, on jette des pains par dessus les murs. C'est une ruse semblable qui sauve lès habitants d'El Goléa. « On prétend que Golea a été assiégée pendant sept ans par les » Touaregs qui s'entêtaient à vouloir la prendre par la famine. Les provisions commençaient, en effet, à s'épuiser, mais une ruse sauva les assiégés. Un matin, les Touaregs virent les murs de la place tapissés de  burnous blancs fraîchement lavés qui séchaient au soleil ; donc elle ne  manquait pas d'eau. La nuit suivante, de grands feux allumés sur » divers points l'éclairaient tout entière ; donc elle ne manquait pas de » bois; Le lendemain, ils trouvèrent, sous les murailles et presque aux » portes du camp, des galettes de belle farine, des dattes, du kouskouçou, dernières ressources que les assiégés avaient sacrifiées pour faire croire à leur abondance. Les Touaregs y crurent et se retirèrent  Le nom de Bent el-Kha.ss n'est pas prononcé, mais sa réputation de sagesse était trop bien établie pour qu'on ne lui fit pas honneur d'un stratagème qui courait dans les légendes du désert. « On raconte » qu'Embârka bent El Khass fut assiégée surla rive gauche de 1'oued Saggar au Sud du qsar de Brezina, par un sultan du Gharb dont elle avait  repoussé les avances et qui en la bloquant, comptait la prendre par le manque d'eau. Mais, voyant un jour les femmes des assiégés étendre au soleil du linge mouillé pour le faire sécher, il s'imagina qu'ils » avaient de l'eau, en abondance et leva le siège, trompé par la ruse » d'Embarka  Nous voyons que Bant el Khass finit par être considérée comme la souveraine de sa tribu" Une forme postérieure de la légende rapporté qu'elle était là fille d'un roi des Arabes. Celui-ci, devenu vieux incapable dé se tenir debout et se faisant porter en litière, laissa tout lé pouvoir à sa fille de qui ses Sujets appréciaient la sagesse. En conséquences,on lui attribua la fondation d'une ville à As'bib', près d'El Beyyodh (Géryville); d'une a Banaqt au sommet de la montagne d'Arbi  .'d'une à 'Aïn el 'Amara enfin des Constructions que les nomades sont incapables de réparer, bien loin d'avoir pu les élever (?). Ainsi la saguià située au S. E. de Lioua et parallèle au cours de l'Oued. Djedi. Elle est aujourd'hui bouleversée, mais paraît avoir une  origine^ romaine. « A une époque fort reculée, d'après la traduction, les Arabes étaient » commandés par une femme nommée Bent el Khras (lisez Bent él Khass)} » celle-ci avait dû souvent lutter contre ses sujets qui ne voulaient pas » reconnaître là souveraineté d'une femme. Pour leur être agréable, et » aussi pour.rehausser son prestige, B"ùt e! Khras fit construire une immense séguia jusqu'à la Mecque, afin que les pèlerins puissent avoir » toujours de l'eau à leur disposition  »,

 A quelle époque peut-on placer l'existence de cette héroïne visiblement légendaire, même dans la tradition algérienne? M. de Castries,sans citer de sources, nous dit qu'Embarka bent el Khâss , femme célèbre de là tribu des Beni Amer, vivait dans le Sahara oranais au xve siècle (?). Mais la connaissance de la littérature arabe classiquenous permet de remonter plus haut : l'existence de Bent el Khass est mentionnée, sans en être d'ailleurs le moins du monde plus certaine, par des auteurs bien antérieurs au xv' siècle et c'est là une preuve de plus qu'on ue saurait étudier d'une façon sérieuse et complète le folk-lore arabe du Maghrib, si l'on n'a pas une connaissance suffisante de la littérature ancienne. La première mention qui soit faite d'elle se trouve dans un vers du poète El Fârazdaq, né en l'an 20 de l'hégire (641 ap. J.-C.) et mort vers 110 (728i de J.-C), c'est-à-dires ept siècles avant la date supposée plus haut. Tu as été honorablement fidèle à un serment, comme Hind fut fidèle à Bent el Khoss (3) El ïyâdi.

Certains commentateurs ont cru que la Hind dont il s'agissait ici était la fille du dernier roi de Hira, mais cette opinion est combattue par Ibn Nobata qui voit avec vraisemblance dans cette Hind (nom très répandu dans l'ancienne Arabie) une autre femme que la princesse de Hira (4). En Orient, elle est appelée Hind et on lui donne pour soeur une certaine Djom'ah contre qui elle plaida devant un juge des Arabes, El Qalmas Q>«*JiJ1). Celui-ci rendit un jugement en sa faveur, si l'on en croit lin vers attribué à Bent el Khoss

Si Dieu récompense l'homme bienfaisant pour sa fidélité, qu'il récompense généreusementQalmas de ma part (1). .. : On voit que partout son père est nommé El Khoss (ou El Khass). Ibn el A'rabi lui donne le nom d'El Khoss ben Djabir ben Qoraït' el lyâdi, d'où le surnom d'El Iyâdyah, porté par sa fille. Mais cette liste d'ascen-* dants de Bent el Khoss est inconnue aux généalogistes Ibn Doraïd (2) et Ibn Qotaïbah (3). Ce dernier mentionne seulement un Qoraït'(k>yi), frère de Qort' (W) fils d'Abou Bekr, remontant par Kilàb, Haouâzin et Nizâr à 'Adnân, l'ancêtre des Arabes, tandis qu'Iyàd, de qui serait descendu Khoss, était le frère dé Nizâr. Le Qoraït' d'Ibn Qotaïbah ne peut donc pas être l'ancêtre de Bent el Khoss (4). Du reste cette désignation d'Iyâdyah a-t-elle quelque valeur? Je ne le crois pas, et les auteurs arabes semblent avoir partagé cette opinion, car quelques-uns font de Bent El Khoss une 'Amâliqâ (Amalécite). issue des débris du peuple de 'Ad, ce qui nous rapporte aux temps fabuleux (5) et nous donne lieu de croire qu'elle n'a jamais existé, pas plus en Arabie que dans le Sud algérien. ' Mais en Orient, comme en Occident, les traits caractéristiques de sa légende sont identiques et les maximes en prose rimée qu'on lui attribue ont le même cachet. Elle est appelée à donner son avis sur les chevaux,

les chameaux, le mariage, et ses sentences ont le même caractère de simplicité du fonds et de recherche de la forme (1). On lui demanda: Quel est l'homme que tu préfères? Elle répondit : L'homme facile et généreux, bienfaisant et illustre, habile et intelligent, le Seigneur redouté. — Y a-t-il quelqu'un qui surpasse celui-là? — Oui, llhomme svelte et mince, fier et élégant, bienfaisant et prodigue, qu'on craint et qui ne craint pas, — Et quel est l'homme le plus haïssable à ton avis? — L'homme lourd et endormi, qui se décharge des affaires sur lès autres, indifférent, faible de poitrine, vil et blâmable. — Et y at-il quelqu'un de pire? — Oui, le sot querelleur, négligent et négligé, qui n'est ni Craint ni obéi. — On lui demanda encore: Quelle femme est préférable Suivant toi?— Celle qui est blanche et parfumée. — Et Celle qui déplaît le plus (2). — Celle qui se tait Si on veut la faire parler et qui parle si on veut la faire taire (3). '.' Un homme alla trouver Bent el Khoss pour la consulter sur là femme qu'il devait épouser. -- Cherche-lâ brune et belle de visage, lui dit-elle, dans une famille brave, ou dans une famille noble, ou dans une famille .puissân-te-i-.—. ïl.ajoutâ : Tu n'as: laissé de côté aucune sorte de femme ? — Si fait, j'ai laissé de côté la pire de toutes : la noiraude toujours malade, aux menstrues prolongées, querelleuse (4). On demanda à Bent el Khoss : « Quelle est la femme la plus méritante? *4 Ëlle:répondit : Celle qui demeure dans sa cour, qui remplit les vases, qui mélange d'eàu le lait qui est dans l'outre, — Quelle est la femme la plus méprisable? — Celle qui soulève la poussière en marchant, qui a Une voix aiguë en parlant, qui porte une fille dans ses bras, qui est -suivie d'une autre et qui est. enceinte d'une troisième. — Quel est le jeune homme préférable? — Le jeune homme aux longues jambes et au long cou, qui a grandi sans malice. — Et quel est le plus méprisable? —Celui qui a le cou enfoncé, les bras courts, le ventre énorme, qui est couvert de poussière, qui a des vêlements déchirés, obéit à sa mère et se révolte contre son oncle paternel » (1). Comme dans les traditions du Sahara, elle est consultée pour l'achat d'animaux domestiques. Son père, voulant acheter un étalon pour son troupeau de chamelles, lui dit : « Indique-moi commentje dois l'acheter ».• Elle répondit : « Achète-le avec le bas de la joue marqué, les joues douces, les yeux enfoncés, le cou épais, le milieu du Corps développé, très haut, très généreux, qui regimbe quand il est frappé du bâton et allonge là tète quand il est chargé entièrement » (2). Les Chameaux paraissent avoir eu sa prédilection, ce qui n'a rien d'étonnant chez des nomades, si on en juge par les réponses qu'on lui attribue : « Quelle est la chamelle la plus vive? — C'est, dit-elle, celle qui mange tout en marchant et dont les yeux Sont brillants comme ceux d'ùh fiévreux. -- Et quelle est celle qui à le moins de valeur? — Celle qui est prompte à aller au pâturage de bonne heure et qui ne donne que ijeu dé lait le matin, — Quel est le meilleur des chameaux? -^ C'est l'étalon au corps énorme, robuste, habitué aux voyages, vigoureux. — Quel est le chameau de moindre valeur? — C'est celui qui est court de taille et qui â une bosse aussi petite que le dos d'une autruche » (3). El Khoss demanda à sa fille : « Est-ce que le chameau de moins de Cinq ans féconde la femelle? — Non, et il ne laisse rien. —Et le chameau, dans sa sixième année, la féconde-t-il? — Oui, dit-elle, mais sa fécondation est lente. — Et celui qui a perdu deux incisives? — Oui, et de la largeur d'une coudée. — Et celui à qui pousse sa première dent de devant? — Oui, mais il est sans force » (4). Un jour elle dit à El Khass : « Une telle éprouve les douleurs de la parturition, en parlant d'une chamelle de son père. — Qui t'en a infor-r méë? — Elle a un tressaillement dans les os de l'utérus, son regard est vif et elle marche en écartant les jambes. — Ma fille, elle va mettre bas » (5). « Quel cheval préfères-tu ? lui demanda-t-on. — Celui qui a un toupet, Qui est bien soigné, robuste, de forte encolure, solide, vigoureux, ardent et rapide » (1). On lui demanda : « Que dis-tu de cent chèvres? ». Elle répondit : « C'est un petit bien derrière lequel s'attache la pauvreté, richesse de faible, gagne-pain de misérable. — Et cent brebis? — C'est une ville Sans défense. — Et cent chameaux?— Quelle excellente richesse que les chameaux ! C'est ce que désirent les hommes. — Et cent chevaux ? -— C'est l'orgueil de qui les possède et il ne s'en contente pas. — Et cent finesses? -- Éloignées la nuit, honte de la réunion ; elles n'ont pas de lait qu'on puisse traire, pas de laine qu'on puisse tondre ; si on attache leur mâle, il est interdit : si on le lâche, il s'en retourne» (2). On lui attribue aussi une réponse un peu différente au sujet de la valeur des différents biens. Le père de Bent el KhàsS lui demanda : Quelle est la meilleure richesse ?<—. Des palmiers solidementplantés dans des terrains humides, qui nourrissent en temps de disette. — Et quoi encore ? — Des brebis à l'abri de l'épizootie, qui te fournissent des agneaux, que tu trais plusieurs fois par jour et te donnent des toisons ; je De connais pas de richesses comme celles -là — El les chameaux ? — Ce sont les montures des guerriers, le rachat du sang versé, le douaire des femmes. — Quel est l'homme le meilleur? — Le plus visité, comme les collines d'un pays sont les plus foulées aux pieds. — Qui est-il ? — C'est celui à qui on demande et qui ne demande pas, qui donne l'hospitalité et ne la reçoit pas, qui rétablit la paix et à qui on ne l'impose pas. — Quel est le pire des hommes? — L'imberbebavard qui tient un petit fouet et qui dit : Retenez-moi loin de l'esclave des Benou un tel, car je le tuerai ou il me tuera. — Et quelle est la meilleure des femmes ? — C'est celle qui a un fils dans son sein, qui en pousse un autre devant elle, qui en porte un troisième dansses bras, tandis qu'un quatrième marche derrière elle (3). On lui demanda un jour : Qu'y a-t-il de mieux? — Le nuage du matin qui suit le nuage de la nuit sur une terre élevée (4). On lui attribué aussi un grand nombre de dictons en prose rimée;(o^1) entre autres ceux-ci qui sont devenus proverbes : Le pire des loups est le loup du ghadha (arbuste épineux) ; le pire des serpents est celui d'un sol aride, la plus rapide des gazelles est celle qui paît la h'allabah; le plus fort des hommes est celui qui est mince ; la plus belle des femmes est celle qui a des formes potelées et le visage ovale ; la plus laide est celle qui est renfrognée et sèche; la plus vorace des montures est celle qui allaite; le meilleur morceau de viande est celui qui est près de l'os ; le plus dur des endroits pour la marche est celui où les cailloux sont sur les rochers; les pires des troupeaux sont ceux qu'on ne peut donner en aumône ni égorger(comme les ânes) ; la meilleure des richesses est une jument soumise ou une série de palmiers fécondés (1). On lui demanda : Quel est le nufigë que tu préfères:? — Celui dont le bord retombe comme une frange, qui Verse la pluie à torrents, énormèj sillonné d'éclairs, bruyant et qui envahit tout (2). ^ — Quel est l'homme le plus important à tes yeux ?"— Celui dont j'ai besoin (3). Elle aurait eu aussi, suivant certaines traditions, l'habitude de poser des énigmes à ceux qu'elle rencontrait, c'est ainsi qu'lbn Nobata, dans son commentaire de l'épitre d'Ibn Zeïdoun (4) lui attribué la sérié d'énigmes que, d'après Hariri (5) une djinnah (comme laSpliyhge des Grecs) proposait aux passants. Tout Comme la djinnah, elle n'aurait cessé ses interrogations qu'après . avoir été couverte de confusion par la réponse d'un de ses interlocuteurs qui devait compléter une série de phrases commençant par « je m'étonne » o^s-ac-?. On a vu plus haut comment elle appréciait l'homme et la femme au point de vue du mariage. Il semblerait que, malgré son désir de se marier, indiqué aussi dans la légende saharienne, elle en ait été empêchée par son père et qu'elle ait cherché des consolations en dehors d'une union légitime. Surprise avec un esclave, elle se contenta de donner pour excuses à ceux qui lui reprochaient sa faute, ces mots devenus proverbes: « La proximité du coussin et la longueur de l'entretien à l'oreille » (c'est l'occasion qui fait le larron). Les savants disent que si elle avait cité le proverbe complet, elle aurait ajouté « et le plaisir de la débauche » (I). C'est sans doute à cet ordre d'idées qu'il faut attribuer deux vers attribués à Bônt el Khass : (Un jeune homme) droit comme la pointe d'une épëe, généreux, brave, de qui je suis éprise, si c'était à ma portée. Je le jure, si on me donnait à choisir entre sa rencontre et mon père, je préférerais n'avoir pas de père (2). On comprend que cette réputation de finesse ait fait attribuer à Bent el KhoSs dans l'ancienne Arabie, la solution d'un problème dont oti fit honneur à une autre femme célèbre par sa perspicacité et non moins fabuleuse que notre héroïne. La plus ancienne version de ce problème se trouve dans une pièce du poète ànté-islamique, En Nâbighah Edz Dzobyâni : « Sois perspicace, comme la jeune fille de là tribu, quand elle vit les pigeons cherchant de l'eau, descendre vers la mare. » Ils étaient resserrés entre les parois de la montagne, et pourtant elle les suivait d'un (oeil clair) comme du verre, qui n'a jamais été enduit de koh'eul contre la chassie. » 0 si seulement, dit-elle, ces pigeons et la moitié (de leur nombre) étaient ajoutés à notre pigeon, cela suffirait. » On les compta et on trouva qu'ils formaient le nombre qu'elle avait dit, ni plus, ni moins.» Les pigeons étaient au nombre de 66; en effet, 66+66 (=33)-f1=100(3)

La plupart des commentateurs attribuent ce calcul à la célèbre Zarqâ El Yemàmahj de la tribu de Djadis, et elle aurait dit en prose riinée : Ce sont ces paroles qu'aurait reprises En Nâbighah, d'après Moh'ammed ben E! 'Abbâs El Yezidi, citant Abou l'Abbâs Moh'ammed ben El H'asan El Ah'oual (1), Et Tebrizi (2), Abou Hilâl el 'Askari (3), Meïdâni (4) et Ed Demiri (5) Moh'ammed ben Et' Tâyeb' el 'Alami (6). El Asmà'i, cité par El A'iam (7), Ed Demiri (8) et El Bâghdâdi (9) remplaçait les pigeons par les qat'as. Mais El Asma'i rapportait avoir entendu des Arabes du désert attribuer la solution de ce problème à Bent et Khoss, dont ils citaient ainsi les paroles (mètre radjaz) : C4J LiâJ! 15 oJ

De ce qui précède, on peut donc conclure que la légende de Bent el Khass fait partie de cette collection de traditions que, dans leur émigration, les Béni Hilal apportèrent avec tant d'autres (i) dans le Maghrib où ils la localisèrent, et que ses origines remontent aux plus anciens temps de la littérature arabe. •

 

 

Le present album comprend 110 photos (format ultra grand angle)
Photos prises le 09 et 13 juin 2021
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Les lieux vus avec mon appareil photo




 

 

Commentaires (1)

Raymond -  Sur : AÏN LAAMARA
  • 1. Raymond - Sur : AÏN LAAMARA | dimanche, 04 juillet 2021
Qu'il est précieux tout ce enseignement !! Béni ceux qui le recueillent et méditent la sagesse !!

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