BENT EL- KHASS

 

 

BENT EL - KHASS

RETOUR SUR DES LIEUX TANT AIMÉS
Mais qui hélas sont voués à une probable destruction, les éffets se font déjà sentir....

 

  Lorsqu'on entre dans le Sahara par l'oasis de Brezina, au seuil de l'oued Segueur,
  on voit surgir du sol, à perte de vue plat et nu, comme une silhouette étrange de
  château démantelé. De près, la forteresse est un plateau tabulaire, rigoureusement
  carré, taillé dans la forme d'un dé à jouer, en pans abruptes. Il a plusieurs kilomètres
  de tour. D'autres rochers volcaniques, de même coupe mais de taille inférieure
  l'entourent comme des ouvrages avancés. Ces falaises sans grèves ont donné leur nom
  à la partie du Sahara qu'elles dominent. On l'appelle la Région des Gour.
  Chaque jour compte plusieurs gara qui ont leur nom et leur histoire.

                                                                                  Qui était Embarka bent el Khass.

Ses yeux étaient noirs et bien fendus. Ses sourcils ressemblaient au trait rondi du noun que trace la main d'un écrivain habile.
Son front semé d'étoiles bleues était large comme la lune dans la nuit de sa rondeur. L'ouverture de sa bouche faisait songer à
une bague, la fraîcheur de ses lèvres à un sabre ensanglanté.
Ses dents brillaient comme des coquillages, ses joues comme des roses.
Ses épaules s'arrondissaient comme un arceau d'ivoire. Sa gorge potelée était de celles dont les textes ont dit :
« Ta gorge réchauffera ton mari et rassasiera tes enfants. »
Et comme Bent-el-Rhass devait commander à des hommes, Allah lui donna par surcroît les dons virils.

Derrière les paroles, sa pensée devinait le secret des coeurs. Derrière les obstacles, ses yeux voyaient à trois jours de marche.
Un jour, sa chamelle favorite se sauva loin du gara, brûlée par l'amour d'automne.
Les vieux cavaliers estimaient son prix à quatre cents boudjou. On aurait donné dix  Personne n'osait annoncer à Bent-el-Khass
le départ de la chamelle bien aimée.

Mais elle-même, étant montée sur sa terrasse, après le.bain, à l'Heure du moghreb, mit la main sur ses yeux à cause du soleil couchant..
Et elle prononça :
- Je vois ma chamelle qui a suivi l'amant de son coeur.
 En même temps, elle cria à haute voix :
- Zem ! Zem !
C'est-à-dire : « Reste-là ! »
Des cavaliers coururent dans là direction que Bent-el-Khass avait, indiquée, et le troisième jour, ils découvrirent la chamelle sous un
bétoum. Agenouillée sur la terre, elle ruminait du drine..

Le Sultan Noir entendit; parler de Bent-el-Khass. Il leva ses tentes et dit à ses cavaliers :
—Allons trouver la femme qui. a une âme, je veux avoir un fils d'elle.
Il envoya devant lui des chanteurs qui au pied de la gara, vinrent déclamer des vers en l'honneur de leur maître :
« Que de fois, il a étendu sur la poussière le mari d'une femme très belle, dont la vie coulait par une blessure semblable à une lèvre
fendue. Bent-el-Khass, interroge les cavaliers si tu ignores ses exploits. Ils te diront qu'il est toujours monté sur un cheval rapide et
couvert de cicatrices.
« Son fer perce les burnous : le héros n'a point d'abri contre sa lance."
« Il le laisse en pâture aux bêtes sauvages qui rongent ses belles mains, ses beaux bras."

« Lorsqu'il met pied à terre pour achever un ennemi, les lèvres du mourant se relèvent sur les gencives. Mais ce n'est pas pour sourire.
« Sa lance s'allonge comme les cordes d'un puits pour s'enfoncer dans le poitrail des chevaux; sa jeunesse brille comme un bracelet
sous les plis d'un haïk. »
Bent-el-khass écouta les chanteurs déclamer. Quand ils eurent déposé leurs instruments, elle répondit par les vers du poète :
« J'ai pour demeure la gara, une citadelle avec de l'eau, où je puise quand je veux. Ma forteresse est élevée ; les aigleseux-mêmes n'y
peuvent atteindre. Si une injustice me vise, je n'en souffre pas. »

Alors le Sultan Noir envoya deux vizirs au pied du rocher pour annoncer ses présents.
- Bent-el-khass ! notre maître a apporté pour toi mille douros dans un coffre.
Il te le fera remettre par dix négresses d'une beauté parfaite, nées le même jour. Tu trouveras parmi ces présents innombrables des
bracelets de bras et de pieds en argent; deux pièces d'étoffe du Soudan de dix coudées, quatre haïks fins, des tapis et des pantoufles de
Fez, quarante guessâa de blé, vingt guessâa d'orge, six pots de beurre, des clous de girofle, du serghîna, du khol et des parfums pour
la toilette des femmes, enfermés dans une haïba en peau de lérouy, avec sa serrure.
Bent-el-khass répondit aux vizirs :
- Dites ceci à votre maître: la quenouille de mes femmes suffit à me vêtir; l'antimoine est aussi sombre dans ce pays-ci que dans le sien.
Les vizirs revinrent au camp, vers l'Achâ, c'est-à-dire deux heures après le coucher du soleil. Le Sultan Noir avait donné l'ordre de
préparer du couscoussou à la poule, au mouton et à la citrouille, des viandes rôties, des dattes et du lait frais pour mille bouches.
Deux nègres tenaient par la bride, l'un à droite, l'autre à gauche, un mulet caparaçonné d'un tapis à franges qui devait ramener la fiancée.
Quand il connut la réponse de Bentel- khass, le Sultan entra dans une grande.colère. Il ordonna :
- Jetez dans la fontaine toutes les toisons des moutons que vous avez égorgés ; aveuglez la source avec du sable.
Demain, l'eau manquera à la Reine des Gour, et peut-être le soleil attendrira son coeur.
Les nègres firent comme leur maître avait dit, et le lendemain, à l'aurore, quand les femmes de Bent-el-khass vinrent pour chercher de
l'eau au puits, elles virent que la source ne sanglotait plus dans le sable.
Elles coururent conter à leur maîtresse la mauvaise nouvelle.
- Sûrement, c'est le Sultan Noir qui a tari la source.
En parlant, elles pleuraient.
Bent-el-khass dit :
- Celui que je hais ne me tient pas encore.
Et elle reprit son visage riant. Une semaine s'écoula ainsi où chacun mesura sa soif. Un matin, les suivantes déclarèrent :
- Il n'y a plus d'eau que pour un jour. Alors, sans s'émouvoir, Bent-el-khass commanda :
- Faites un tas de tous les haïks, de tous les burnous, de toutes les gandoura.
Lavez-les avec cette eau qui vous reste. Étendez-les sur des cordes au grand soleil.
Les femmes crurent que la douleur avait troublé la raison de Bent-el-Rhass.

  Elles murmurèrent :
  - Maîtresse, voulez-vous nous répéter l'ordre que vous nous avez donné?
  Bent-el-khass lisait dans leurs coeurs.
  Elle répéta :
  - Faites comme j'ai dit. Je vois plus loin que vous.
  Les médecins du Sultan Noir lui avaient promis la capitulation de Bent el-khass pour le jour même.
  Il était monté à cheval avec l'aurore pour se porter au-devant de la reine.
  Au soleil levant, il aperçut toutes ces étoffes blanches que le vent gonflait comme des voiles.
  Il fit appeler ses médecins et demanda :
- Que vois-je donc là-haut?
Les médecins répondirent :
- Ce sont sans doute des nuées blanches qui se reposent sur le sommet du Gara avant que de reprendre leur course.
Mais le Sultan noir s'emporta dans une colère si terrible que tous ses cavaliers sentirent trembler leurs cœurs
- Vous mentez ! Ce ne sont pas là des nuages : ce sont les haïks de Bent-el-khass. Elle les blanchit pour nous narguer La reine boit là-haut
à quelque source inconnue. Jamais nous ne la prendrons par la soif.
Le Sultan fit couper la tête à ceux qui l'avaient trompé, puis il leva le siège pendant la nuit avec toute son armée.

Et Bent-el-khass vécut cent années arabes. Sur sa terrasse ou sous sa tente, Elle eut un grand nombre d'enfants qui tous furent valeureux.
Quand elle mourut, le kohl de ses yeux descendit sur ses dents, le souak qui rougissait ses gencives monta à ses yeux.
Et par la volonté d'Allah, très juste, très bon, elle garda dans la mort une splendeur de beauté, terrible, telle que les hommes n'en ont plus
jamais vue.

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Le présent album comprend 54 photos
  Rubrique mise en ligne le 24 Avril 2017
NB/Branchez vos enceintes acoustiques pour écouter la musique d'accompagnement

LA CITADELLE VUE AVEC MON APPAREIL PHOTO 

 

 

 

 

 

 
 

 

Commentaires (4)

Georges. S -  Sur :  BENT EL-KHASS
  • 1. Georges. S - Sur : BENT EL-KHASS | lundi, 01 mai 2017
J’ai visionné le dernier site que vous m’avez envoyé
comme d’habitude d’excellentes photos et la région magnifique , je comprends que le désert vous manque , un peu de
patience et bientôt vous pourrez repartir en croisade.Clignement d'œil
recevez toutes mes amitiés
Georges
Mijo -  Sur : BENT EL- KHASS
  • 2. Mijo - Sur : BENT EL- KHASS (site web) | lundi, 01 mai 2017
Bonjour Noureddine,
Quelle belle légende digne des Mille et une nuits. La belle Bent-El-Kass a eu raison d Sultan Noir, malgré ses ruses pour la conquérir. En tant que femme je ne puis que l'admirer. :o)
Vos belles photos nous emmènent dans des lieux qui nous font rêver, comme toujours, mais que vous, vous fréquentez régulièrement. En çà, vous êtes un privilégié, merci de nous faire profiter de vos balades et découvertes. :o)
Prenez soin de vous,
Amicalement,
Mijo
Jean -  Sur: BENT EL - KHASS
  • 3. Jean - Sur: BENT EL - KHASS | jeudi, 27 avril 2017
Magnifique "éperon" rocheux, dominant de sa lumière l'immense plaine
aride. Il évoque bien l'épopée de Bent-El-Khass, la fière rebelle!
Un grand merci, Noureddine.
Gardez la forme!
Jean.
Bruno -  Sur : BENT EL- KHASS
  • 4. Bruno - Sur : BENT EL- KHASS | lundi, 24 avril 2017
Merci admiratif...On ne peut que contempler ces vues,ces monuments naturels arrosés de lumière,et ces espaces qui furent le cadre de l'épopée de Bent El-Khass ,...Merci

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